Bertrand Bonello – en revenant du cinéma http://enrevenantducinema.fr Tue, 24 Apr 2018 20:15:36 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=4.9.8 Nocturama de Bertrand Bonello http://enrevenantducinema.fr/2016/09/16/nocturama-de-bertrand-bonello/ http://enrevenantducinema.fr/2016/09/16/nocturama-de-bertrand-bonello/#respond Fri, 16 Sep 2016 17:01:15 +0000 http://enrevenantducinema.fr/?p=2149 Une jeunesse que personne n’écoute

Quand on considère Bertrand Bonello comme un cinéaste important, qu’on chérie L’Apollonide et le court-métrage Cindy the doll is mine comme des œuvres majeurs, on … Lire la suite...

The post Nocturama de Bertrand Bonello appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
nocturamaUne jeunesse que personne n’écoute

Quand on considère Bertrand Bonello comme un cinéaste important, qu’on chérie L’Apollonide et le court-métrage Cindy the doll is mine comme des œuvres majeurs, on est embarrassé face au ratage que représente Nocturama.
Pourtant le film est séduisant, comme une variation sur Elephant de Gus Van Sant, avec un sujet qui présente des similitudes, des jeunes passant à l’acte violent, mais aussi par le travail sur la temporalité, une même scène vue par différents personnages sous différents angles, les marches le long de longs couloirs, jusqu’au tee-shirt avec une tête d’animal, référence au célèbre tee-shirt à tête de taureau du film fondateur de Van Sant. On pourrait penser qu’il n’y a rien à voir entre la violence de Colombine et ce dont parle Nocturama, mais finalement pas tant que ça, ce qui est un des problème que pose le film.
Ça commence dans le métro que Bonello filme avec virtuosité, des jeunes qui marchent sans parler, se croisent, regards concentrés ou regards vides, on sait qu’il va se passer quelque chose et on est happé par leur déambulation, comme une sorte de chorégraphie abstraite, scandée par un décompte horaire.
De même, on sait le talent du cinéaste pour filmer des lieux, sa fluidité est étincelante pour faire exister l’espace du magasin où se réfugient les personnages, ainsi la façon dont il utilise la lumière, le choix des morceaux de musique, le travail sur la répétition, est impressionnant. Le cinéaste pourrait choisir de ne faire qu’un film qui avance par rimes poétiques, pulsations, sensations, cherchant la confrontation visuelle et en rester là, sauf qu’il veut dire quelque chose et c’est là où ça coince, Bonello veut faire un film politique, il veut transmettre quelque chose de l’époque dans laquelle on vit, de la jeunesse de notre pays, ainsi Adèle Haenel disant « ça devait arriver » mais sans préciser quoi ni pourquoi ni comment, etc., il ancre le film dans le monde d’aujourd’hui avec cette télévision d’info continue qui cite Valls, par exemple. Le cinéaste se méfie des discours, du didactisme, il ne veut pas nous faire des leçons et c’est tant mieux mais le problème est qu’il veut dire des choses sans les dire, par des images, des symboles. Ça devient à la fois très théorique, sur comment on est rattrapé par le spectacle, la consommation, et en même temps très simpliste.
Le film ne dit rien politiquement.
Des jeunes font des attentats dans une sorte de gauchisme nihiliste assez flou, avec un personnage d’étudiant en science po qu’on pourrait vaguement imaginer comme un potentiel rédacteur de l’Insurrection qui vient (qui a déjà infusé les plus pertinents Le Grand jeu de Nicolas Pariser et L’Avenir de Mia-Hansen Løve, de nombreux échos pour un livre qui n’en mérite pas tant mais qui a pu intéresser Bonello par son romantisme). On les présente d’abord comme très préparés et ensuite ils se retrouvent par une astuce scénaristique dans ce grand magasin, la dichotomie entre l’action réfléchie du début et la stase consumériste de la deuxième partie est artificielle. Une jeunesse prête à s’engager radicalement qui, plongée dans un endroit où tout est disponible, se perd. En une nuit quelqu’un qui fait une action violente pour changer le monde, se rêve d’un coup en costard, ça n’a pas de sens, c’est prendre les personnages pour des imbéciles.
De même on nous montre un groupe qui semble tout faire pour ne pas être identifié, puis un des héros invite un SDF à les rejoindre, comment peut-on croire à ça ? On adhère volontiers à un cinéma qui fuit le réalisme mais là, ça devient juste une idée théorique (le lumpen prolétariat en victime collatéral, un truc du genre) qui va contre ceux qu’il filme, transforme ces militants en des crétins. Bonello a le droit de penser que la jeunesse est dans une grande confusion politique, qu’elle a une colère, une rage (pour reprendre la terminologie insurrectionnaliste) sans savoir quoi en faire mais de là à dire qu’elle n’a aucune pensée, ça ne peut qu’être exagéré et méprisant.
Ainsi ce qui est vraiment gênant c’est le regard sur ces personnages. Ce sont des pantins, ils sont interchangeables, correspondent à des stéréotypes comme s’ils était un panel représentatif d’une jeunesse sacrifiée. Ils ne se passent pas grand-chose entre eux. Quand un des héros voit un mannequin habillé comme lui, comme s’il était son double, on peut y voir une critique de la société de consommation qui annihile l’individu, sauf que c’est le cinéaste lui-même qui les transforme ainsi, c’est son regard qui les réifie, c’est lui qui décide qu’ils n’aient aucun discours politique un tant soit peu élaboré. La jeunesse serait si stupide ?
Dans L’Apollonide, le dispositif formel est transcendé par l’empathie qu’on a pour ce groupe de femmes prostituées, dès le départ Bonello est avec elles, et nous aussi, nous sommes avec elles, de leurs côtés, nous sommes émus par ce qu’elles vivent sans que l’auteur ne cède sur ses choix esthétiques. De même dans Le Pornographe, il y avait une tendre ironie dans le regard de Jean-Pierre Léaud sur de jeunes révoltés. Là, le regard sur ces jeunes manque singulièrement d’empathie, il ne s’agit pas d’être ou non en adéquation avec eux, avec leurs actes, mais de les regarder, de les écouter, de les aimer un minimum. On les voit juste jouer, se grimer, se donner en spectacle comme des coquilles vides. Ainsi quand ils meurent, ils restent ce qu’ils ont toujours été, des mannequins en polystyrène, comme semble le signifier ce plan en bas de l’escalier, où le couple gît. Vivants ou morts, ils ne sont là que pour faire de beaux plans, rien ne palpite. On est glacé par la froideur des exécutions mais presque indifférent à leur sort, tant cela est esthétisé. C’est dommage parce que les acteurs sont plutôt bons et arrivent à donner malgré tout une parcelle d’humanité. La mort du SDF provoque la même sensation d’une idée de mise en scène qui va contre ce qu’il est censé dénoncé. C’est Bonello qui fait de cette mort un spectacle et lui seul.
On est surpris qu’un cinéaste si talentueux ne se rende pas compte en construisant son film qu’il répète avec ses personnages ce que le monde, la société fait avec cette jeunesse. Il ne les regarde pas, leur dénie la parole. La dernière phrase « aidez-moi » s’adresse peut-être à la société mais elle pourrait autant s’adresser à un cinéaste qui a force de « vouloir-dire », de visions poétiques en oublie ceux qu’il filme.
Nocturama de Bertrand Bonello, France, 2016 avec Finnegan Oldfield, Hamza Meziani, Manal Issa…

The post Nocturama de Bertrand Bonello appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
http://enrevenantducinema.fr/2016/09/16/nocturama-de-bertrand-bonello/feed/ 0
Bilan 2014, des cadres et du mouvement http://enrevenantducinema.fr/2014/12/31/bilan-2014-des-cadres-et-du-mouvement/ http://enrevenantducinema.fr/2014/12/31/bilan-2014-des-cadres-et-du-mouvement/#respond Wed, 31 Dec 2014 18:16:52 +0000 http://enrevenantducinema.fr/?p=2094

La fin de l’année est l’occasion de faire notre mini bilan et surtout de revenir sur des films dont on n’a pas parlés parce qu’au moment où on les a … Lire la suite...

The post Bilan 2014, des cadres et du mouvement appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
saintlaurent2

La fin de l’année est l’occasion de faire notre mini bilan et surtout de revenir sur des films dont on n’a pas parlés parce qu’au moment où on les a vus on n’avait pas envie, parce qu’on n’était pas d’humeur, parce qu’on avait d’autres projets et que de toute façon, on n’est pas payé pour ça, alors on fait ce qu’on peut.

Revenir donc sur quelques films.

D’abord Saint-Laurent ou comment Bertrand Bonello prend le genre très cadré du biopic pour le faire éclater et utilise cette déconstruction pour s’approcher de la vérité de quelqu’un, une vérité qui pourtant se dérobe.
À la différence de ces biopics qui présentent des hommes au destin glorieux et au caractère conquérant ou du moins particulier (à part évidemment le magnifique Van Gogh de Pialat), Yves Saint-Laurent est présenté comme absent au monde (c’est la force de Gaspard Ulliel de savoir incarner ce personnage fantomatique ne laissant qu’une empreinte), drogué, devenant une marque, un logo, plus qu’une personne, traversant une décennie importante de l’histoire sans s’en rendre compte, un personnage en creux, à côté de la plaque la plupart du temps.
Le dispositif théorique de la mise en scène est dans le morcellement avec flash-back, flash-forward, split-screen, scène qui semble détachée du reste, rêve, hallucination, lettre lue, dilatation du temps, et accélération, des changements de rythme fréquents, jusqu’à cette fragmentation de l’écran pour un défilé triomphant. Ce morcellement n’est pas une coquetterie, elle est le miroir d’un homme qui n’arrive pas à trouver son unité, qui n’a pas de consistance.
Comme souvent chez Bonello, ça pourrait être froid et intellectuel mais il y a un parfum de tristesse toujours présent, quelque chose qui ne rentre pas dans le dispositif, une douleur profonde de la difficulté à être. Du héros de De la guerre aux prostituées de l’Apollonide, de la Cindy (dans Cindy the doll is mine) à Yves Saint-Laurent, tous ces personnages essaient de trouver une raison de vivre, essaient d’échapper à une réification (avec l’idée que le cinéma c’est aussi se poser la question de la réification par le cinéaste). C’est symptomatique avec ces chiens appelés Moujik de 1 à 4, interchangeables, un film sur le narcissisme, sur le fait que de vivre uniquement dans les yeux des autres nous dévitalise, nous fait disparaître, nous transforme en pantin.

mummyOn retrouve dans Mommy de Xavier Dolan cette volonté de se confronter à un dispositif. Là il s’agit d’encadrer la vie ou de la laisser se développer, de savoir comment on se bat avec un cadre qui emprisonne, de travailler sur cette tension. Un adolescent hyperactif, violent, plein de vie mais ne supportant pas les limites qu’on lui donne face à une mère larguée, qui fait ce qu’elle peut mais n’y arrive plus. Tout le jeu du film est entre ces corps qui courent, se frappent, crient, pleurent, s’aiment, s’engueulent, se déchirent et comment ils habitent, occupent les plans.
Un film très théorique où bien sûr le cadre carré enserre les personnages, rend le face à face entre la mère et le fils étouffant.
Le début part étrangement sur une piste naturaliste, la travailleuse sociale, la nouvelle loi imaginaire et vite ça déborde de partout, rien ne retient la vie qui passe, circule, et l’arrivée de la voisine permet que toute cette énergie prenne de l’ampleur et se canalise dans le même mouvement. L’arrivée du tiers brise la dualité mortifère.
Ce qui est bien avec Xavier Dolan, c’est qu’il ne s’excuse pas, qu’il n’est pas modeste, il y va, fonce, et garde sa route, sa trajectoire est sûre, ça lui permet d’oser des choses naïves et puissantes dans leur naïveté, voir le héros courir avec son caddie au milieu de la route en criant liberté, et ouvrir le cadre ainsi, ça pourrait être casse-gueule, ridicule mais ça passe, jamais on se sent piégé par l’émotion que livre ce film, on n’est pas manipulé, tout est là devant nous, à vif. L’histoire est d’une grande simplicité, les lignes sont évidentes, il ne les cache pas.
Ce film nous insuffle son énergie vitale et donne envie d’envoyer valser les convenances. Ce n’est pas rien. Et si ça pouvait aider à renverser ce vieux monde, ce serait encore plus.

Deux autres films émergent cette année (répétons-le, parmi les films vus, il y a bien sûr des manques et des oublis) le Map to the stars de Cronenberg et sa rage réjouissante et sombre, et à son opposé Love is strange de Ira Sachs, qui après le beau et rugueux Keep the light on (qui s’approchait des films mumblecore), confirme son attachement aux palpitements du cœur. Soit un vieux couple dont le mariage va précipiter un déménagement, un film d’une grande élégance, aux plans d’une grande et belle simplicité, d’une émouvante douceur, avec une fin magnifique et bouleversante d’humanité.

love is strange

Une année sans choc majeur comme l’Inconnu du lac l’an passé peut-être, mais beaucoup de bons films, souvent basés sur des confrontations d’acteurs. La fougue des Combattants de Thomas Cailley révèle un cinéaste prometteur qui doit avoir plus confiance en son regard (la volonté de faire cinéma est une des limites de ce premier film) et à sa capacité à diriger des acteurs (Adèle Haenel, qui impose sa présence essentielle dans le cinéma français d’aujourd’hui face à un Kévin Azaïs touchant)
Olivier Assayas est aussi, mais on le savait déjà, un grand directeur d’acteur et d’actrice, ce que donnent Juliette Binoche et Kristen Stewart sous son regard dans Sils Maria est impressionnant, le film l’est aussi souvent avec de magnifiques plans dans les Alpes, avec parfois, c’est le défaut mignon d’Olivier Assayas, quelques moments trop explicatifs et surlignés.

On n’oubliera pas bien sûr Under the skin, Bird et leur proposition étrange. Le cinéma est travaillé par le fantastique, l’étrangeté, désire s’envoler, et c’est tant mieux. Ne le bridons surtout pas.

The post Bilan 2014, des cadres et du mouvement appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
http://enrevenantducinema.fr/2014/12/31/bilan-2014-des-cadres-et-du-mouvement/feed/ 0
Eden de Mia Hansen-Løve http://enrevenantducinema.fr/2014/12/01/eden-mia-hansen-love/ http://enrevenantducinema.fr/2014/12/01/eden-mia-hansen-love/#respond Mon, 01 Dec 2014 17:24:38 +0000 http://enrevenantducinema.fr/?p=2088 A côté, tout proche.

Certains films ne se donnent pas d’emblée, il faut aller les chercher, Eden est de ceux-là, il semble se présenter comme la description d’une époque, les … Lire la suite...

The post Eden de Mia Hansen-Løve appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
edenA côté, tout proche.

Certains films ne se donnent pas d’emblée, il faut aller les chercher, Eden est de ceux-là, il semble se présenter comme la description d’une époque, les heures de gloire de la french touch vues par un DJ, Paul. On s’imagine qu’on va se retrouver immergé dans l’effervescence d’un mouvement artistique, suivre ses acteurs avec la musique, la nuit, les drogues, les rencontres, etc., bref un film sex, drugs and rock’n’roll ou le rock’n’roll serait remplacé par la musique garage qu’aime le héros. Tout est là et pourtant quelque chose cloche, rien n’accroche vraiment, le héros paraît palot, presque fade, son comparse DJ aussi. Ça commence avec des jeunes qui se plongent dans une nouvelle culture, une radio, des fanzines, on entre dans une rave, un vieux bâtiment, musique forte, stroboscopes qui emportent mais ça ne dure pas, l’inertie s’impose. On a l’impression d’être tenu à distance.
Le film parcourt une longue période de temps mais les scènes semblent se répéter, comme s’il n’y avait aucune progression, comme ces personnages dont la carrière ne décolle pas.
Par exemple, Mia Hansen-Løve filme presque toutes les raves de la même façon, de loin, d’au-dessus, avec des danseurs qui lèvent les bras, chantent les paroles, des spots lumineux sur eux, ces scènes paraissent interchangeables, presque pauvres stylistiquement. On pensait être emmené par cette pulsation et ce n’est pas le cas. L’entourage du héros semble absent (hormis le personnage d’Arnaud auquel Vincent Macaigne apporte un peu de légèreté), une bande d’amis qu’on voit par fragments, des personnages qui sont juste ébauchés avec leur vie hors-champ, il en est de même pour les femmes que croisent le héros, qui paraissent des faire-valoir, dont la présence ou l’absence n’a pas d’influence sur le cours des choses (avec des actrices qui ont pourtant d’emblée une présence particulière), à part Louise qui lutte pour exister aux yeux de Paul, pour partager quelque chose avec lui, incarnée avec force et combativité par Pauline Étienne. Tout paraît inhabité, désincarné dans un film volontairement de basse-intensité, peuplé de fantômes..
Nous sommes désemparés et comprenons le projet du film avec la deuxième partie, la chute du héros, confronté au renoncement, à l’échec et qui par miroir apporte du relief à l’histoire qui précède. Toute la première partie était comme un rêve cotonneux, que le héros a traversé sans être présent, à part la musique qui le fait vibrer, il n’a rien vu, rien compris à ce qu’il vivait. Il est ballotté, se drogue mais sans excès, s’enfonce dans des problèmes d’argent sans le vivre d’une façon dramatique, sans qu’il se rebelle. Le film est travaillé par la pulsion de mort, par la compulsion de répétition qui fait que la tension est absente, le héros la cherche mais ne la trouve pas, la répétition rend tout vide.
Ainsi c’est un portrait de quelqu’un qui n’est pas là, ni avec lui-même, ni avec les autres (on peut trouver des ressemblances avec le très beau Saint-Laurent de Bonello qui filmait aussi, avec des choix de mise en scène plus forts, le portrait d’un Yves Saint-Laurent en retrait du monde, comme un biopic en négatif).
Et la mise en scène suit ce chemin, elle est au plus près de Paul, elle voit le monde par lui. On comprend que le héros est une surface plane qui n’imprime rien, que les personnes (et en particulier les femmes) que le héros rencontre n’existent pas parce qu’il ne les voit pas, ne peut les rencontrer réellement, d’où le déchirement qui l’emporte dans une très belle scène où il se rend compte qu’il est à côté de la plaque.
On le sait, Mia Hansen-Løve aime faire des ellipses sèches, par blocs, sans scènes de transition, faisant confiance au rythme interne du film, elle utilise de nombreux jump-cut qui donnent l’impression d’un mouvement permanent, d’une grande fluidité mais sans aspérité, elle travaille beaucoup en creux, par petites touches, au risque parfois de l’insignifiance, avec quelque chose de très minimaliste dans sa mise en scène comme dans ses dialogues, très frontaux.
C’était casse-gueule d’aller autant sur un versant déceptif, de refuser ainsi l’intensité facile que le monde de la french touch aurait pu apporter, on s’en trouve dérouté et pourtant étrangement cela sédimente en nous, travaille et des jours après la vision du film, une douce mélancolie persiste.
Eden de Mia Hansen-Løve, France, 2014 avec Félix de Givry, Pauline Étienne, Hugo Conzelman, Vincent Macaigne…

The post Eden de Mia Hansen-Løve appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
http://enrevenantducinema.fr/2014/12/01/eden-mia-hansen-love/feed/ 0
Bilan de 2011, un cinéma vivant http://enrevenantducinema.fr/2011/12/30/bilan-de-2011-un-cinema-vivant/ http://enrevenantducinema.fr/2011/12/30/bilan-de-2011-un-cinema-vivant/#respond Fri, 30 Dec 2011 12:25:39 +0000 http://enrevenantducinema.fr/?p=726 L’apollonide de Bertrand Bonello

L’année de cinéma qui se clôt est une bonne année avec de nombreux grands films, une année où le cinéma français a livré des œuvres diverses … Lire la suite...

The post Bilan de 2011, un cinéma vivant appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
L’apollonide de Bertrand Bonello

L’année de cinéma qui se clôt est une bonne année avec de nombreux grands films, une année où le cinéma français a livré des œuvres diverses et riches, une année aussi où le festival de Cannes a été une vitrine exceptionnelle (il suffit de lire les palmarès cinématographiques de l’année de journaux défendant différentes approches du cinéma pour constater le nombre de films cités étant passés par Cannes) ce qui a fait se bousculer les sorties des films majeurs entre aout et fin octobre, l’année du cinéma dit d’auteur se condense maintenant sur ces quelques mois, ce qui semble leur avoir plutôt réussi en terme d’entrées, comme quoi la vision de bons films donne envie de retourner en salle.
Ainsi il n’est pas si facile de faire ressortir tel ou tel film, mon choix est partiel vu que je suis loin d’avoir vu tous les films sortis, j’ai peut-être manqué celui de l’année mais tant pis, j’en distinguerais trois.
L’Apollonide de Bertrand Bonello
La dernière piste de Kelly Reichardt
Habemus Papam de Nanni Moretti.
Ce sont ces films qui restent le plus dans ma mémoire des mois après leur vision, des films qui arrivent à mêler des choix de mise en scène forts, un regard sur le monde (le rapport à l’autre et aux origines dans le film de Kelly Reichardt, la dépression, et le refus du pouvoir du film de Moretti, le rapport à l’exploitation chez Bonello entre autres) et une attention forte à des corps, des visages, des gestes, des films qui mettent l’humain au centre sans les juger, des films aussi qui ont des dispositifs très étudiés, le huis clos et les répétitions de l’Apollonide, l’alternance entre la majesté des scènes du Vatican et la fuite dans la ville plus proche du cinéma direct dans Habemus Papam, la sécheresse et le dépouillement de La dernière piste, et qui laissent en même temps une grande place à l’imaginaire du spectateur, des films qui ouvrent plus qu’ils n’enferment.
D’autres films m’ont marqué et ont aussi su allier une forme personnelle, une approche sensible des rapports humains tel que Un amour de jeunesse de Mia-Hansen Love, Les biens aimés de Christophe Honoré, La guerre est déclaré de Valérie Donzelli, Comment savoir ?, film injustement passé inaperçu de James L.Brooks et bien sûr d’autres. Tous ces films ont en commun d’être attentifs aux corps à corps, aux battement des cœurs sans jamais être mièvres ou racoleurs.
Tout le contraire d’un film comme Drive (j’y reviens parce qu’on devine un culte se former autour de ce film qui n’en mérite pas tant) qui a un style fort, contient quelques scènes impressionnantes mais, au regard des films précités, qui ne dit rien sur le monde. Nicolas Winding Refn considère ses acteurs et ses personnages comme des objets fétichisés là pour embellir le plan, on sent qu’il a été inspiré par des films comme Crash ou History of violence de David Cronenberg, sauf que ce dernier s’intéressait à ses acteurs et ses films portent une vision sur la société. Il est intéressant de voir l’engouement de nombreux cinéphiles pour ce film narcissique, replié sur lui-même dans cette période de capitalisme triomphant où l’humain est une variable d’ajustement pour rassurer les marchés. Drive a su capter l’air du temps.
Je continuerais pour ma part à défendre les cinéastes qui regardent de face les hommes, les femmes et le monde dans lequel nous vivons. Plutôt qu’un cinéma qui nous englue dans sa maitrise et son savoir faire, plutôt qu’un cinéma qui nous surplombe, un cinéma qui libère notre imaginaire et nous donne envie de vivre malgré tout.

The post Bilan de 2011, un cinéma vivant appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
http://enrevenantducinema.fr/2011/12/30/bilan-de-2011-un-cinema-vivant/feed/ 0
Sleeping beauty de Julia Leigh http://enrevenantducinema.fr/2011/11/13/loin-de-la-peau/ http://enrevenantducinema.fr/2011/11/13/loin-de-la-peau/#comments Sun, 13 Nov 2011 18:23:32 +0000 http://enrevenantducinema.fr/?p=667 Loin de la peau

Une femme jeune, Lucy, se prostitue auprès d’hommes proches de la mort, ils paient pour passer une nuit pour coucher avec elle alors qu’elle est endormie. … Lire la suite...

The post Sleeping beauty de Julia Leigh appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
Loin de la peau

Une femme jeune, Lucy, se prostitue auprès d’hommes proches de la mort, ils paient pour passer une nuit pour coucher avec elle alors qu’elle est endormie. Le film paraît très pensé en amont, une référence aux contes, la maquerelle qui pourrait être une sorcière, les hommes comme des ogres, et l’héroïne qui est entre la belle au bois dormant et le petit chaperon rouge, le film est très pensé aussi dans sa construction, des plans séquences souvent fixes, des couleurs pâles, une lumière froide, comme si cette posture artistique permettait à la cinéaste de trouver la bonne distance par rapport à son sujet sauf que cela lui permet surtout de ne pas se mettre en danger.
Dans les films qui parlent de sexualité, la question du voyeurisme du cinéaste et du spectateur affleure de façon plus acérée, la réponse de la cinéaste Julia Leigh est dans une intellectualisation de son rapport au sujet et au corps mais ce choix pose problème. Bertrand Bonello dans son superbe l’Apollonide ne se posait pas la question de la même façon, dès le départ, il se plaçait du côté des femmes prostituées, il était avec elles et nous l’étions aussi, ainsi à aucun moment, nous étions dans une position surplombante par rapport à elles en tant que personnages et en tant qu’actrices, nous n’étions pas voyeurs de ce qui leur arrivait, sans nous confondre avec elles nous étions à leur niveau, enfermés de la même façon.
Julia Leigh nous place dans une position très gênante et désagréable, elle filme son personnage endormie au prise avec des hommes qui peuvent la regarder, jouer avec elle sans qu’elle s’en rende compte, ainsi elle nous place, nous spectateurs, du côté de ces hommes qui la touchent même si la mise en scène est relativement chaste et ne cherche pas à en rajouter. Lorsqu’ensuite on voit Lucy mettre une culotte pour pouvoir dormir chez elle parce qu’elle ignore ce qui se passe pendant ces nuits, ou quand on la voit troublée en regardant une femme qui dort dans un bus, nous avons un temps d’avance sur elle, nous en savons plus qu’elle. Cela peut être intéressant conceptuellement mais c’est une position morale qu’on est en droit de rejeter.
Julia Leigh par son regard froid et clinique se trouve à faire la même chose que la maquerelle du film, elle isole le corps, le donne en pâture en le regardant de loin, la mise en scène des jeux sexuels métaphorise la mise en scène du film. La cinéaste donne à voir sans se donner elle-même à voir, elle illustre son sujet, parfois très bien (quelques scènes touchent comme celle très belle où l’héroïne choisit d’offrir sa nudité à son ami en mauvaise état, la façon dont elle filme le moment où Lucy enlève sa chemise en pleurant montre que Julia Leigh a du talent), mais sa volonté de contrôle sur le déroulement de son histoire et sur les corps qu’elle filme empêchent toute émotion, et donnent l’impression étrange que le sentiment comme la sexualité sont des choses sales. C’est tout le mérite de l’actrice Emily Browning, vibrante tout du long, de se rebeller contre ça, et le cri de terreur qu’elle pousse à la fin du film est un cri face à la mort mais, sans que cela semble intentionnel, cela peut aussi s’entendre comme un cri contre la réification de son corps par la cinéaste.
Sleeping beauty de Julia Leigh, Australie, 2011, avec Emily Browning, Rachael Blake, Ewen Leslie…

The post Sleeping beauty de Julia Leigh appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
http://enrevenantducinema.fr/2011/11/13/loin-de-la-peau/feed/ 1
Drive de Nicolas Winding Refn http://enrevenantducinema.fr/2011/10/03/sortie-de-route/ http://enrevenantducinema.fr/2011/10/03/sortie-de-route/#comments Mon, 03 Oct 2011 00:52:14 +0000 http://enrevenantducinema.fr/?p=549 Sortie de route

Il existe certains mystères dans l’existence, l’un d’en entre eux est de savoir comment Drive a pu être sélectionné au dernier festival de Cannes et en remporter … Lire la suite...

The post Drive de Nicolas Winding Refn appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
Sortie de route

Il existe certains mystères dans l’existence, l’un d’en entre eux est de savoir comment Drive a pu être sélectionné au dernier festival de Cannes et en remporter le prix de la mise en scène. Après tout ce n’est que l’avis d’un jury mais ça reflète ce que certains considèrent comme de la mise en scène.
Cela pourrait être vu comme une très petite série B avec quelques scènes réussies, d’ailleurs ça commence plutôt bien avec un braquage filmé de façon très efficace, une autre scène est assez belle, le héros, joué par Ryan Gosling qui ressemble vaguement à Stan Laurel en moins charismatique, embrasse sa protégée (incarnée par Carey Mulligang) dans un ascenseur avant de tuer le troisième occupant de l’habitacle dans un mouvement plutôt fluide, on peut aussi sauver une fusillade brutale dans un hôtel qui dure peu de temps mais qui surprend.
Sinon nous ne sommes que dans la pose, le réalisateur sait filmer une voiture qui roule, ce qui n’arrive pas si souvent hélas, par contre il ne sait pas comment filmer le reste, les discussions, les engueulades, l’attente, la relation entre un enfant et le héros, les regards amoureux. Il pense que pour faire un plan il faut toujours trouver un truc, faire un effet, il n’abuse pas des mouvements de caméra, c’est un artiste, il est au-dessus de ça, par contre il aime mettre la caméra à un endroit particulier, faire de longs plans fixes très (trop, beaucoup trop) composés ou de légers travellings, il ne semble pas intéressé par les acteurs qui donnent du coup l’impression de s’ennuyer puisque tellement peu désirés.
Nicolas Winding Refn préfère s’amuser avec son joujou, les contre-plongées se multiplient, loin de l’idée d’un Ken Loach filmant à hauteur d’homme, là, il filme au niveau du genou (d’où on regarde le monde est un choix politique). Il cherche sans cesse à placer les corps où les visages en rapport à la ligne des décors, tables, arbres, par exemple un des protagonistes parle, il est filmé en contre plongé comme il se doit, et le réalisateur fait en sorte que sa tête se retrouve à la croisée de deux néons. Lorsqu’il fait jour, le soleil est toujours rasant pour provoquer un joli reflet dans la caméra, il abuse aussi de la profondeur de champ pour rendre impressionnant quelqu’un qui marche dans un couloir et ce qui fait qu’une simple scène dans un supermarché semble totalement artificielle alors qu’il ne se passe rien, n’oublions pas évidemment les ralentis, les flash-forwards, les plans tarabiscotés. Ainsi il filme un affrontement au milieu de miroirs et de femmes, seins nus, qui ne réagissent pas comme si elles étaient des mannequins, les corps nus, la violence, un côté kitch assumé, on sent dans cette scène tout le côté racoleur de la pose arty. Vu qu’il est incapable de filmer le frémissement entre deux personnes qui se rencontrent, l’amour naissant entre les deux personnages est tourné comme dans une publicité pour du shampoing, la mère, l’enfant, le bord de la rivière, le soleil se reflétant dans l’eau, la musique qui enrobe le tout.
Nicolas Winding Refn veut faire le coup de Taxi Driver de Martin Scorcese, le petit film violent et noir, très stylisé qui espère devenir culte, sauf que d’un côté il y a un cinéaste, de l’autre un petit malin avec un petit talent. Tout sonne faux, ça pue la prétention, le jeu des acteurs se doit d’être atone et dévitalisé, ce qui est à la mode, mais n’est pas Kaurismaki qui veut, ce dernier met de l’humanité derrière le masque de ces acteurs, là l’humanité, on s’en fout, l’humanité pour le coup c’est passé de mode, et comme c’est ça qui compte.
La musique est soit de l’indie rock pour bien confirmer que l’auteur a bon goût, soit un son strident parce que quand même il y a une sacrée tension qui se dégage, il ne faudrait pas l’oublier, même si ça fait déjà un certain temps qu’on pense à autre chose et ce ne sont pas les quelques scènes gores qui vont nous réveiller.
La lumière est souvent jaune, la ville est vue d’au-dessus pour donner cette impression de… de quoi déjà ?, une bataille a lieu en ombres chinoises pour créer une sensation de… ou peut-être pour… je cherche, je cherche, celui qui a la réponse peut nous prévenir. Bon n’en jetons plus.
Dire que le jury du festival de Canne et de nombreux critiques se sont fait avoir par ce maniérisme pompier est affligeant. Dire que des cinéastes comme Bonello ou Moretti n’ont pas eu de prix à Cannes, même pas celui de la mise en scène, alors qu’un seul plan de leur derniers film a plus de valeur que les 1h40 de Drive, l’est encore plus.
Drive de Nicolas Winding Refn, EU, 2011 avec Ryan Gosling, Carey Mulligang, Bryan Cranston…

The post Drive de Nicolas Winding Refn appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
http://enrevenantducinema.fr/2011/10/03/sortie-de-route/feed/ 5
L’Apollonide – souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello http://enrevenantducinema.fr/2011/09/22/comment-sechapper/ http://enrevenantducinema.fr/2011/09/22/comment-sechapper/#comments Thu, 22 Sep 2011 14:53:51 +0000 http://enrevenantducinema.fr/?p=522 Comment s’échapper

On entre dans ce film par un travelling dans le couloir de la maison close, le ton est ainsi donné, le mouvement est lent, la lumière, le grain … Lire la suite...

The post L’Apollonide – souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
Comment s’échapper

On entre dans ce film par un travelling dans le couloir de la maison close, le ton est ainsi donné, le mouvement est lent, la lumière, le grain de l’image crée une impression onirique, des prostitués passent comme des spectres. On entre dans ce lieu et on en sortira très peu, enfermés dans le film comme ces prostitués recluses.
L’idée d’un film dans un bordel pourrait laisser attendre un film sensuel, ou du moins excitant, pervers, ou alors un film sur une communauté joyeuse malgré la difficulté du métier, il n’en est rien, le film est froid, âpre, malaisant, oppressant. Nous assistons à un processus de dévitalisation, le personnage de Clotilde (superbement incarnée et désincarnée par Céline Sallette mais toutes les actrices sont impressionnantes de Jasmine Trinca à Adèle Haenel) semble en être le fil conducteur, elle se plaint d’être là depuis trop longtemps, rien ne semble plus avoir de sens pour elle, sauf s’extraire de ce monde, elle s’éloigne de ses clients comme elle disparaît du film.
Ainsi le film est moins sur la pulsion sexuelle que sur la pulsion de mort, c’est à dire sur le processus de répétition qui finit par faire baisser la tension, (thématique proche du Crash de David Cronenberg), il n’y a pas vraiment de conflits, tout paraît calme, la vie des pensionnaires et des clients est répétitive, les mêmes jeux, les mêmes scènes de toilettes, les mêmes conversations chuchotées des clients sur l’actualité de l’époque, le même son de l’horloge, les rapports sexuels, tout se répète, tout s’équivaut comme semble le montrer les quelques moments où l’écran se divise en quatre, quelque que soit le corps, quelques soient les actes, tout est sur le même plan, les corps deviennent des pantins, des poupées comme dans cette scène puissante où une prostitué en imite les mouvements heurtés pour satisfaire un fantasme. Seul l’acte barbare d’un client crée une rupture dans le film, une césure. Cela ne se passe pas pour rien à la fin du XIXème siècle, au début du travail à la chaîne, de l’industrie, au début de la mécanisation du corps.
Le dispositif radical pourrait laisser croire à un cinéma très théorique mais nous ne sommes pas dans la réflexion, le dispositif travaille sur la sensation, sur quelque chose d’hypnotique, il ne nous donne pas tant à penser qu’à ressentir.
Bertrand Bonello emmène le film vers le rêve, à la lisière du fantastique, comme si on était dans l’antichambre de la mort, en opposition à la façon très triviale dont il filme le travail des prostitués (la toilette, le médecin, les conseils à une nouvelle venue). L’entrée des prostitués auprès des clients est comme une entrée en scène, et les scènes sexuelles sont filmées soit devant des miroirs, soit devant un fond noir renforçant cette impression de théâtralité froide et distante. Seules la scène renoirienne se passant au bord d’une rivière où les corps nus semblent reprendre un instant vie et les quelques moments d’échanges, de tendresses et d’humour entre les prostitués apportent quelques respirations pour ce corps malade qu’est le film.
Ainsi ce qui se joue n’est pas juste la prostitution mais c’est aussi le jeu de la vie, comme le montre une des scène les plus fortes, suite à la mort d’une des prostitués, ses consœurs dansent et pleurent, tentent de se réconforter les unes, les autres sans se regarder. La scène est très étrange, c’est une tristesse qui ne déborde pas, qui semble intérieure à chacune, nous ne sommes pas dans le drame, la tristesse renvoie chacune à sa propre vie, son propre désarroi par rapport à l’absurdité de la mort. Cette scène rappelle Cindy, the doll is mine, un magnifique court-métrage de Bertrand Bonello, car si ce cinéaste tourne autour d’obsession comme le corps soumis, transformé, la sexualité (comme dans Le pornographe ou Tiresia) la mort, la dilatation du temps (dans De la guerre, nous trouvions déjà des personnages tournant en rond dans un espace restreint en cherchant rien moins que le sens de la vie) c’est ce court-métrage qui semble être la matrice de L’Apollonide. Asia Argento y joue une photographe et son modèle, dans cette hommage à Cindy Sherman, on y voyait une Asia Argento avec une poupée dans les bras et une tristesse qui semblait venir de nulle part, juste de la difficulté d’être.
Ainsi on retrouve dans L’Apollonide cette inquiétante étrangeté qui irrigue toute l’œuvre de ce cinéaste, inquiétante étrangeté qui s’insinue et laisse un profond sentiment de tristesse inexpliquée.
L’Apollonide – souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello, France, 2011 avec Hafsia Herzi, Céline Sallette, Jasmine Trinca, Adèle Haenel, Alice Barnole, Noémie Lvovsky…

The post L’Apollonide – souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
http://enrevenantducinema.fr/2011/09/22/comment-sechapper/feed/ 3
Les Biens-aimés de Christophe Honoré http://enrevenantducinema.fr/2011/08/31/la-tristesse-des-midinettes/ http://enrevenantducinema.fr/2011/08/31/la-tristesse-des-midinettes/#comments Wed, 31 Aug 2011 10:14:57 +0000 http://enrevenantducinema.fr/?p=437 La tristesse des midinettes

Christophe Honoré est un cinéaste qui fait fracture, détesté par certains, lui reprochant son sentimentalisme, son abus des références et un aspect bobo loin des réalités … Lire la suite...

The post Les Biens-aimés de Christophe Honoré appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
La tristesse des midinettes

Christophe Honoré est un cinéaste qui fait fracture, détesté par certains, lui reprochant son sentimentalisme, son abus des références et un aspect bobo loin des réalités de la vraie vie des vrais gens, un cinéaste qui ne serait pas assez sérieux, aimé par d’autres dont nous sommes, trouvant dans ses films un sens du mouvement, une humanité dans son regard sur ses acteurs, un élan de vie mêlé de tristesse qui nous chamboule.
Son dernier film Les Biens-aimés ne va pas arranger les choses et c’est tant mieux, il nous intéresse aussi pour cela, il ne cherche pas à être dans l’air du temps, il défend son univers, sa vision du cinéma, il s’inscrit dans l’histoire du cinéma français et ne s’excuse pas d’être un héritier de la nouvelle vague alors qu’aujourd’hui il est de bon ton d’oublier cette histoire, de revenir à cette idée que le cinéma, c’est un scénario solide, des acteurs qui composent et un réalisateur ayant une grande virtuosité technique, bref que ça doit en mettre plein la vue, un cinéma d’avant les nouvelles vagues qui ont suivi la seconde guerre mondiale, retour de bâton théorique dont le grand prêtre serait Michel Ciment de Positif qui exècre Honoré et ce qu’il présente, il est ainsi la cible des cinéphiles réactionnaires (nous ne considérons pas que tous les critiques qui n’aiment pas Honoré le sont pour autant, mais nous parlons d’un mouvement d’ensemble qui voudrait que le cinéma français soit représenté par Jacques Audiard, Bertrand Tavernier plutôt que par Honoré, Bertrand Bonello ou Mia Hansen-Love par exemple).
Ceci serait déjà des raisons suffisantes pour défendre cet auteur mais nous aimons aussi sa vision et sa pratique du cinéma, il tourne beaucoup, ce qui est en soi ni un défaut ni une qualité, mais plutôt que de chercher pendant des années la perfection (la perfection est obscène comme le décrétait François Truffaut), l’œuvre ultime, le grand film qui impose sa puissance à tous, il transmet son plaisir de tourner et tant pis s’il y a des scories, un plan foireux ici, quelque chose de surlignée là, l’important est le mouvement, le geste, il essaie d’attraper l’instant où il se passe quelque chose entre les acteurs plutôt que d’être dans la construction du plan qui va impressionner, capter le visage de Chiara Mastroianni dans la nuit comme si c’était un plan volé, filmer au plus près des corps nus qui font l’amour, voir ce que ça crée, filmer la maladresse d’un chant pas tout à fait maitrisé touchant par la fragilité que ça produit.
Dans Les Biens-aimés, la première partie, un Paris des années 60 coloré d’un bleu et rose venant d’un film de Jacques Demy, est un Paris irréel qui pose les bases de son film, nous ne sommes pas dans une approche qui se veut réaliste, dans le sens où ça doit faire vrai, nous sommes face à un film dont l’objet est le sentiment et uniquement cela, Les Biens-aimés fonctionne par strates, nous allons traverser le printemps de Prague, le 11 septembre, etc. on part du rose et du bleu pastel pour aller vers le gris, le noir comme dans ce moment de bascule, cette superbe scène chantée où l’on croise la mère et la fille à deux périodes différentes sur le même pont. Si on retrouve cette tonalité de tristesse mêlée de joie qui trame son cinéma, cette histoire qui parle de la perte, de l’amour impossible ou de son usure comme dans la trilogie parisienne (Dans Paris, les Chansons d’amour, La belle personne), on sent plus de lourdeur dans les corps, dans ce qui s’échange au diapason d’une société dépressive (avec parfois quelques facilités dans la volonté de coller à l’époque), l’air est plus étouffant, la légèreté étant surtout incarné par les personnages plus âgés, les trentenaires semblent, eux, tétanisés. Par exemple le triolisme était ludique dans les chansons d’amour, là il précède le drame. On rit moins mais on perçoit toujours les lignes de fuite, si le film est plus âpre que ses précédents, il n’en est pas moins un appel à ne pas se laisser enfermer, un appel à continuer à aimer, à chanter malgré tout, à continuer de vivre quelques soient les malheurs de l’époque ou les drames traversés, un appel aussi à continuer de faire un cinéma qui nous transforme en midinettes, ces filles qui savent qu’au fond il n’y a rien de moins frivole que de se raconter et de vivre des histoires d’amour.
Les Biens-aimés de Christophe Honoré, France, 2011 avec Chiara Mastroianni, Catherine Deneuve, Ludivine Sagnier, Louis Garrel…

The post Les Biens-aimés de Christophe Honoré appeared first on en revenant du cinéma.

]]>
http://enrevenantducinema.fr/2011/08/31/la-tristesse-des-midinettes/feed/ 1