Le royaume de Ga’Hoole – la légende des gardiens de Zack Snyder

 

Pas très chouette…

Zack Snyder me fait penser au David Fincher des débuts : un petit malin à l’égo sur-dimensionné qui fait son beurre en pillant allégrement les restes d’un cinéma de genre moribond. Son unique titre de gloire est d’avoir indirectement relancé la carrière de George A. Romero*. Après avoir réussit l’exploit de transformer l’excellent comics Watchmen en blockbuster aseptisé, il prend ses fans à contrepied en réalisant un film d’animation destiné au jeune public.

Alors voilà : il était une fois deux frères adolescents, l’un plutôt doué et rêveur, l’autre moins doué et donc un poil frustré. Ils se font tous deux enlever par une armée de « Sangs Purs » qui les enrôle de force. L’objectif de ces bons aryens est simple : dominer les autres communautés du coin. Alors que le frère frustré embrasse sans regrets le côté obscur, l’autre parvient à s’enfuir, rencontre en chemin des compagnons pittoresques et rejoint les héros des contes de son enfance. Parce qu’en fait ces personnages légendaires sensés protéger les faibles, les « Gardiens de Ga’Hoole », ben ils existent en vrai! Après une formation express, il part à la filoche, bla-bla-bla, mon dieu, c’était un piège, patati-patata, combat fratricide, les gentils gagnent même si bon, la guerre, c’est mal, et on finit sur une belle ouverture pour le second volet de la franchise.
Soyons clair, ce n’est pas du côté de l’histoire qu’il faut chercher un semblant d’originalité… Non, l’argument massue du film, c’est que ses protagonistes sont… roulement de tambours… des chouettes et des hiboux!!! Mais attention, pas des versions anthropomorphisées à la Disney ; on sent qu’il y a eu des recherches sérieuses en pré-production pour coller à la réalité, ce que m’a confirmé une spectatrice hululophile. L’animation de nos amis strigidés est particulièrement réussie et on y croirait presque – sauf qu’ils portent des casques en métal et écrivent des livres. Par contre, Snyder à beaucoup plus de mal à ancrer leur environnement dans le réel : prédateurs nocturnes oblige, la quasi totalité du film se déroule à l’aube et au coucher du soleil. On a ainsi droit à une succession de paysages de carte postale avec des effets de lumière très aboutis mais qui auraient plus leur place dans un jeu vidéo.
Au niveau narratif, le réalisateur tente de respecter les règles érigées par l’oncle Walt en accolant au héros une ribambelle de sidekicks archétypaux : un excentrique qui s’oppose à un vieux briscard, le tout formant l’inévitable duo comique du film, un faible qu’il faut protéger et même un serpent rose (!). Mais tout ce petit monde se retrouvent rapidement évincés de l’histoire quand apparaissent les Gardiens du titre, des guerriers majestueux qui subjuguent immédiatement le jeune Soren. Côté mise en scène, on retrouve les travers habituels du réalisateur : une fascination pour la violence qu’il tente ici de justifier maladroitement – je vous rappelle que c’est un film pour enfants – et l’abus de mouvements de caméra compliqués et de ralentis qui nuisent fortement au rythme du long métrage.
Plus dérangeant, on retrouve l’idéologie un peu rance déjà présente dans 300 et Watchmen, à savoir la nécessité sociale d’une élite guerrière pour encadrer les faibles – qui du coup sont bien incapables de se défendre par eux-même vu qu’ils sont à priori relégués aux autres tâches de la communauté. Ainsi, dans la pratique, les « Gardiens de Ga’Hoole » ressemblent étrangement aux « Sangs Purs » qu’ils combattent, la cruauté en moins. Je ne sais pas vous, mais moi, une société comme ça, ça me fait froid dans le dos…

* Réalisateur de

      La nuit des morts-vivants

(1968), de

      Zombie

(1978) et du

      Jour des morts-vivant

(1985), George A. Romero a dû attendre le succès commercial du remake de

      Zombie

réalisé par Zack Snyder en 2003 pour qu’un studio accepte enfin de financer le quatrième volet de sa saga. Alors que l’original proposait une critique acerbe de la société de consommation,

      L’armée des morts

n’est qu’un film d’horreur de plus où les questionnements politiques ont disparu au profit de l’action. Comble de l’hérésie, les zombies version Snyder courent comme des lapins écossais…

Le royaume de Ga’Hoole – la légende des gardiens (Legend of the guardians – the owls of Ga’Hoole) de Zack Snyder, EU, 2010.

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