Paul de Greg Mottola

 

Greg, Simon, Nick, Paul et les autres…

L’affiche était trop belle : Greg Mottola, le réalisateurs le plus intéressant sorti de l’écurie Apatow met en scène un scénario de Simon Pegg et Nick Frost, le duo comique anglais le plus bandulatoire de ces dix dernières années. Hélas, la mayonnaise ne prend pas et le film, sympathique au demeurant, est loin de combler nos attentes.
Pensez-donc : d’un côté le réalisateur de Supergrave et de Adventureland, soit ce qui se fait de mieux en matière de comédie adolescente américaine. De l’autre, les acteurs déjantés du diptyque anglais d’Edgar Wright consacré aux genres de cinéma, Shaun of the dead et Hot Fuzz. Au milieu, un casting jouissif de seconds rôles issus des travaux précédents du réalisateur, comme le fidèle Bill Hader, ou encore Jason Bateman – un brin monolithique – et Jeffrey Tambor – tout simplement génial en auteur de SF blasé – réchappés de feu Arrested Development. Seth Rogen prête sa voix à l’extra-terrestre Paul et lui confère une épaisseur indéniable et un humour potache bienvenu. Certains gags sont hilarants, comme lorsque Paul redonne la vie à un oiseau sous le regard attendrit de nos deux anglais, avant de l’ingurgiter goulument en précisant que c’est meilleur quand c’est vivant.
Mais plus le film avance, plus l’intrigue se développe, plus le malaise s’installe. Déjà, la culture geek de nos héros est un peu réductrice : c’est une excellente idée de faire de Nick Frost un écrivain et de Simon Pegg un dessinateur – hommage direct à la littérature et à l’illustration britannique qui firent les beaux jours de la science-fiction anglo-saxonne. Mais leurs mépris pour la culture populaire américaine est un peu trop appuyé, comme lors des scènes au ComiCon. Plus grave, résumer la science-fiction étatsuniène à une poignée de lieux cultes et de films de Steven Spielberg* est tristement réducteur, et ce n’est pas l’hommage tardif aux Alien(s) de Ridley Scott de James Cameron via le cameo de Sigourney Weaver qui équilibre les choses.
Le vrai problème du film, c’est que les univers respectifs de Mottola – l’épopée héroïque d’adolescents ordinaires en route vers l’âge adulte – et de Pegg & Frost – clowns trentenaires flegmatiques, croisement improbable entre la culture populaire et les Monthy Python – ne fonctionne jamais. Conflit de génération? Pas seulement : l’originalité du réalisateur s’efface devant une intrigue passablement convenue qui réduit drastiquement les temps-morts et les pauses. Dommage, car c’est en investissant et en magnifiant ces moments que Greg Mottola a su nous séduire dans ses deux derniers métrages. Oublions vite ce faux-pas et rongeons notre frein en attendant de retrouver le duo anglais à domicile : après les films de zombies et les films d’action, Edgar Wright a prévu de les plonger en 2012 dans l’univers des films catastrophes…

*Notons au passage que les deux acteurs prêtent leur voix à Dupont et Dupond dans les adaptations à venir de Tintin, que réalisent Peter Jackson et… Steven Spielberg… Étrange coïncidence, non?

Paul de Greg Mottola, EU, 2011 avec Seth Rogen, Simon Pegg, Nick Frost, Jason Bateman, Jeffrey Tambor…

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