A mort les loser
On connait le sillon creusé par des films comme Litte Miss Sunshine, Juno, une patine de cinéma indépendant américain, un regard sur les Etats-Unis d’en bas, des couleurs automnales, un côté cool qui se voudrait rebelle, le tout emballé dans de la guimauve pour que tout le monde y trouve son compte et au final une morale conservatrice, la famille, il n’y a que ça de vrai ! De quoi s’assurer le succès du film à petit budget que personne n’a vu venir, donnant l’impression aux spectateurs de faire partie des privilégiés découvrant une perle alors qu’ils ne sont que les cibles d’un produit très marketé, les Winners laboure le même terreau.
Un avocat loser qui fait une petite magouille et qui se retrouve à s’occuper d’un vieux et de son petit fils, on pourrait imaginer une vague influence du Théorème de Pasolini sur ce corps étranger qui par sa présence va transformer tous les membres d’une famille mais on est à des années lumières de cela, on pourrait penser aussi que c’est un film sur les victimes de la crise mais au final non, l’objet n’est pas là, les problèmes d’argent se résolvent finalement sans difficulté.
Si Paul Giamatti et Amy Ryan sont plutôt touchants, Alex Schaffer en fait des tonnes dans la peau de l’adolescent plus honnête et sérieux que les adultes malgrè son look légèrement underground (il est tatoué dans le dos et ses cheveux sont blancs). La réalisation est sobre et anodine, le programme se déroule comme prévu. On s’ennuie puis on s’énerve face à cette histoire d’un jeune cassé par la vie et sa mère droguée mais qui grâce à la parfaite petite famille américaine (même si elle a un peu triché mais ne nous inquiétons elle va vite rattraper ses erreurs) et grâce au sport (ils font de la lutte pour donner un côté original et provincial) et à l’effort va s’en sortir et finir par faire du croquet dans le jardin familial dans la joie et la bonne humeur.
Le sommet de l’abjection est atteint lors d’une scène dans un tribunal avant le procès qui doit décider qui aura la garde du vieillard et de l’enfant, d’un côté la famille modèle, si gentille, de l’autre la méchante mère cupide, la mise en scène pousse le spectateur à espérer que la mère va perdre, assassinée par ce plan où elle est seule, l’étrangère, celle qui fout la merde, à l’écart, heureusement nous n’irons pas au procès et la mère cède en larme et se rachète en laissant la garde au père de remplacement. Tout le monde est sauvé, tout va finalement bien, la mère droguée repart seule, le vieillard peut habiter chez lui, la famille a un nouveau fils, l’équipe de lutte locale a un nouveau joueur.
C’est juste dégueulasse.
Voir ce film réactionnaire donne envie de revoir Greenberg de Noah Baumbach, du cinéma indépendant âpre et profond qui est sincèrement du côté des accidentés de la vie et de la société étatsunienne.
Les Winners (Win Win) de Thomas McCarthy, EU, 2011 avec Paul Giamatti, Amy Ryan…